9. A bout de Souffle
Dans cette Demi-Finale de Coupe de Monde disputée à Windhoeck, Mark s’était encore engagé comme jamais. Il gisait à nouveau au sol, épuisé, éreinté par une rencontre d’anthologie. Son adversaire principal était sorti en fin de match sur une civière, et la morale y avait gagné.
Michael Battenberg
L’attaquant allemand Michael Harry Battenberg était un fils unique dont on savait peu. C’était même un drôle d’oiseau. Il n’était ni frêle, ni expressif, mais se tenait systématiquement à distance des interactions sociales, semblant planner au-dessus de la mêlée. Et son physique de bourrin, muni de cuisse saillante comme un cheval de trait, n’avait rien non plus d’un poète-rêveur. En somme, sa puissance était inégalée, et sa discrétion assourdissante.
Contre les conseils du staff médical, Michael était le seul joueur qui venait à bicyclette à l’entrainement, annonçant même habiter à plus de trente kilomètres de l’enceinte quotidienne du HSV. Maintenant âgé de 25 ans, titulaire au Hamburger SV, il avait l’occasion de s’illustrer et d’esquiver comme à son habitude les feux des projecteurs. Ce qu’il fit en terminant meilleur buteur de l’édition annuelle (déjà un peu en bout de course) de la « European Cup of Traditional Football », en ayant inscrit 7 buts sur 6 rencontres.
Dans la finale, face au HAC, le HSV avait dû batailler. Cependant, avec l’envolée de Battenberg servi dans un trou de souris par le milieu suisse Kovalcic des Hambourgeois, les bleus firent le break. Michael s’était échappé sans coup férir, et avait encore inscrit un de ses buts en force, au raz du poteau, imparable pour le gardien havrais. Et voilà comment Battenberg acquit son premier trophée international.
Duel en vue à la Coupe du Monde Namibienne
Entre Juin et Juillet 2066 se dispute en Namibie, la première Coupe du Monde en Afrique depuis longtemps. Les favoris américains, grands-bretons et allemands font leur chemin au 1er tour, et se qualifient ensuite jusqu’en Demi-Finale.
La première Demi-Finale oppose Germains et Britanniques à Windhoeck, dans un match au sommet sur un territoire où anglais et allemands ont eu leur influence dans l’histoire. Les communautés s’en souviennent encore, même si l’histoire a évolué. C’est aussi la fête pour un pays qui s’est soudainement développé vers le milieu du siècle et qui a eu la chance de vendre son projet de Coupe du Monde, notamment soutenu fermement par des alliés historiques.
Mark White, défenseur anglais populaire et de renom, sait qu’il y affrontera Michael Battenberg, l’attaquant mystérieux de la Mannschaft, et qui a étrangement été laissé au repos pour le Quart de Finale contre le Japon. Mark, lui, a suivi sur le banc le 4e match de poule contre l’Afrique du Sud, mais a joué l’ensemble des rencontres depuis, marquant même d’une tête le but qualifiant la Grande Bretagne Unifiée contre le Brésil.
Grande-Bretagne Unifiée 3 – Allemagne 2
Cette Demi-Finale va se jouer sous une pluie battante en première période, ce qui décidera à fermer le toit et à procéder à des opérations de séchage à la mi-temps. Le score y est alors de 1-1, Mark a couvert tant bien que mal son adversaire, un peu plus costaud que lui. Michael a toutefois exécuté une passe décisive, celle de l’ouverture du score de la 22e minute.
En deuxième période, la dramaturgie va s’accroître, à la fois sur le score et les événements du terrain. Trois joueurs allemands seront exclus. Le score passera de 1-2, but de Battenberg sur pénalty, à 2-2 puis 3-2 en quelques minutes à l’approche de la fin de rencontre.
83e minute. Mark était déjà épuisé quand il tacla Michael, qui eut alors un malaise, bien que le contact ait été jugé correct à 52,01% par l’ordinateur d’aide à l’arbitrage. Mark avait certes emporté quelque peu le tibia de Michael en plus de la balle, mais on ne s’expliquait pas l’espèce de léthargie qui survint pour l’attaquant allemand. Le staff médical intervint des deux côtés, pour relever Mark, mais aussi pour soigner Michael. Le temps était comme suspendu.
Michael finit par être évacué sur une civière, à peine conscient. Mark récolta un carton jaune, qui valut la colère du gardien-capitaine allemand, qui fut exclu ; bien que Mark, dit « Le curé », fit généreusement amende honorable. Et les événements s’enchainèrent alors plutôt favorablement pour l’équipe qui portait les couleurs du Roi Georges, qui, lui, avait exceptionnellement fait le déplacement – ancien joueur et sélectionneur de football qu’il était.
A bout de Souffle
Si Mark finit la rencontre en héros mais à bout de souffle, épuisé de ses efforts constants et sans limites, Michael ne s’en remit pas du tout. Un phénomène chimique avait affecté ses organes vitaux par surplus de substances d’abord inconnues mêlant hormones, dopamines et substances nano-médicales.
Il eut par conséquent une bien difficile fin de parcours déclenchée par cette histoire. Ce fut pour lui le dernier match international, et même le dernier match professionnel, puisqu’on avait détecté des nano-mécanites historiques de puissance, dont les traitements dataient de son enfance. Ce n’était donc pas tout à fait un homme qu’affrontaient les adversaires de Battenberg, toutes ces années.
Après d’énormes doutes pendant plusieurs mois, sur le bien-fondé des compétitions et la propagation de soupçons tous azimuts, des mesures draconiennes avait été prises en sus de celles existantes dans la détection et la prévention médicale. Notamment par des moyens de détection qui furent développés pour empêcher ces ultimes moyens de triche chimique, qui avaient expliqué la puissance chevaline de certains athlètes.
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