23. Retour au Mexique

Anaïs et Cheickh

Anaïs Simonetta et ses 39 ans venaient d’être honorés par la Présidente de la Fédération Française de Football, quand, à l’étage de la Tour Eiffel en ce 1er jour de l’été, elle rencontra Cheickh Diouf – un acteur bien malheureux qui s’était fait connaître auprès de la doyenne de la FIFA Lara Dickenmann.

Cheickh Diouf avait perdu son frère footballeur Babacar Amadou dans des circonstances tragiques et avait dû mener un combat judiciaire difficile pour sa mémoire. Les quelques mois qui en suivirent le virent se tourner vers l’ésotérisme des plus folkloriques, un cran plus loin vers la racine sénégalaise de sa famille. Son aura avait grandi dans ce combat médiatisé aux côtés de l’avocat Pape Sene, et soutenu par l’ex-présidente de la FIFA . Il abhorrait désormais ses événements diffusés en ligne où ses costumes attirait l’œil. Il semblait vouloir exorciser un passé…

Anaïs et Cheickh se croisèrent d’abord sans se voir, mais au gré des discussions, ils furent progressivement mis en relation. Et ce qui se raconta-là était sans commune valeur.

L’offre

Comme une attraction de la soirée, au gré d’un sortilège, Cheickh promettait de faire voyager ses hôtes de marques dans le temps du football. Il demanda à Anaïs :

Cheickh : « Je vous offre de revenir à la Coupe du Monde Mexicaine de 1986… Le Mundial ! ».

Anaïs, qui vient juste de quitter Marc-Julien Triskell, médaillé du soir : «  Waouh. Je n’étais pas née, loin de là. Mais je connais la légende de cette Coupe du Monde. »

Cheickh : « Si vous me faites une belle offre, je vous propose de revivre cette période, au cœur de l’action… Combien me donnez-vous ? »

Anaïs, amusée au bras de JF et entourée de Selma Bacha, Juan Juan et Michelle Vaillant : « Aha, je n’en sais rien… 25000 crédits ?! »

Le sénégalais concentre son bagout, et sans le remarquer se met à tutoyer l’ancienne joueuse professionnelle des Bleues faisant fi de l’univers de pacotilles qui l’entourait :

Cheickh : « Alors pour 25000, tu peux voir les 3 premiers matchs de la France, contre le Canada, l’Union Soviétique et la Hongrie. Et le premier but d’un certain « JPP » en Bleu ! ».

Anaïs : « Eh bien c’est fascinant…, et si je donne 30000 ?! »

Cheickh : « Alors tu peux voir le match des huitièmes de Finale de la France, contre l’Italie. Un match intense… Et je t’invite à la fête d’après-match ! »

Anaïs : « Vraiment pas mal…, c’est toujours la France que vous offrez ? »

Cheickh : « La France, c’est pour toi ! »

Anaïs : « HiHi…, et si je veux voir France-Brésil et assister à la fête qui a suivi, avec les Platini, Fernandez, Amoros, Bats… ? »

Cheickh : « Pour toi, c’est un bon prix : 50000 ! »

Anaïs, incrédule mais enjouée : « Ah, si seulement on pouvait… »

Cheickh : « Trinque avec moi, et on en reparle demain… »

Anaïs s’exécute, et poursuit une soirée en l’honneur du football international sur les hauteurs d’un Paris éclairé, revigoré, mais asséché par l’été qui grandissait.

Le rêve

Dans la nuit, Anaïs s’éveilla à peine trois heures après s’être couchée. Elle avait fait un rêve intense. Celui d’une rencontre de football ancestrale et légendaire, en pleine chaleur d’été, dans une ambiance latino-américaine de folie. Une saveur d’exotisme mêlée à de la fête et surtout à un événement teinté de surréalisme.

Elle avait été à l’Estadio Jalisco de Guadalajara le 21 juin 1986. Elle avait vu Zico, Careca, Julio Cesar, Alemao, Socrates et les vedettes françaises de l’époque. Parmi elle et au sein de l’excellente charnière du milieu, Michel Platini, dont c’était le 31e anniversaire, une légende dont on célébrait dernièrement la mémoire. Il allait égaliser héroïquement et passer par des montagnes russes d’émotions. Et ce ballon qui circulait intensément d’un camp à l’autre sans sortir des limites du terrain…

Anaïs, assise dans son lit, se remémorait les événements intenses qu’elle avait rêvés. Elle avait vu le meneur de jeu français rater son tir au but, mais aussi le gardien français, Joël Bats, réaliser de grands exploits, et Bruno Bellone dont le tir se fracasse contre le poteau, revient contre le dos du gardien brésilien et termine au fond des filets… Et finalement le fantasque Luis Fernandez, cet autre fils d’immigré de 1ère génération, de donner la victoire au bleu dans une liesse festive du côté français qu’on avait rarement vue. Fernandez tomber dans les bras de Platini. Une image d’une drôle d’époque. Et la consternation brésilienne, une foule jaune et bleue - incrédule, choquée, mais aussi un public progressivement acquis à la cause de la France.

C’était décidé, Anaïs rappellerait Cheickh dans la matinée – et lui demanderait quel sort il lui avait jeté.

C’était bien plus que du football.


(Rédigée le 11.07.2022)

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