6. Boubacar (M)Amadou Diouf
Boubacar Mamadou Diouf est né à Thiès au Sénégal, sous le nom de Boubacar Amadou Diouf. Lors de son passage en République Démocratique de France, il sera obligé de modifier son nom par la junte locale parisienne. Mais son histoire va bien au-delà de ce détail, et influera sur les méthodes de recrutement à l’approche des années 70.
De Thiès à Dakar
A 14 ans, Boubacar est un fier joueur longiligne des U16 du Thiès FC, club qui évolue en 2e division sénégalaise. Son agilité, sa vision du jeu, mais aussi une véritable grâce bondissante lui valut l’intérêt de plusieurs clubs alentours. A 15 ans 1/2, c’est Génération Foot qui remporte la mise, et parvient à faire venir Boubacar, qui sera d’ailleurs rapidement un titulaire dans l’équipe U18 qui domine le championnat national.
Boubacar a quitté sa famille, mais voit alors souvent son cousin, un fervent supporter de Génération Foot. Il supporte ainsi la distance d’avec Thiès, et celle aussi de certains de ses frères qui sont partis pour l’Europe. Demeurer en proche banlieue de Dakar était quand même un beau privilège. D’autant que le club quintuple champion du Sénégal, en est toujours un des clubs-phares, grâce aussi à son activisme au sein de l’Alliance des Clubs Grenat.
Les sirènes retentissent
A 17 ans, Boubacar entre à plusieurs reprises sur le terrain au poste de milieu défensif et se montre très à la hauteur, alors que le club navigue en bonne position au Championnat. Et les sirènes de l’argent vont retentir à plusieurs reprises au travers d’agents, qui étaient pléthores aux abords des pelouses de Deni Diram Ndao.
C’est Moussa Nsambé qui tirera le gros lot, au nom justement de l’Alliance des Clubs Grenat. Moussa parviendra à flatter Boubacar, et le convaincra de rejoindre non pas le Torino FC ou le FC Metz, mais Hearts of Midlothian, club écossais, de plus en plus actif au Sénégal. Toutefois l’accord de départ prévoit un prêt au Paris FC, dans la capitale française – et c’est cela qui faisait la différence. Revoir son frère Cheickh était une perspective déterminante pour Boubacar Amadou Diouf.
C’est donc précisément avec cette décision prise avant même sa majorité, que le jeune milieu défensif et polyvalent sénégalais, commettait une erreur dont il ne pouvait prévoir l’impact.
Edimbourg, Paris et Bristol
Son passage à Paris sera un enfer de blessures, de non titularisation, de harcèlement par la police politique, qui lui vaudra la modification de son 2e prénom, et diverses difficultés d’intégration, qui ne le faisaient plus qu’espérer un retour au pays. Mais le Hearts of Midlothian FC s’était engagé sur 5 saisons. Après cette année parisienne et aucun match complet disputé au 2e niveau français, Boubacar devrait faire ses preuves à Bristol au 3e niveau britannique. Et l’aventure ne tourna pas mieux. Seul bonheur, c’est un retour pascal pour une semaine au pays, payé au moyen des grasses rétributions rendues possibles par le championnat britannique.
Boubacar revint à Bristol avec trois jours de retard et fut puni. Il ne figurera plus sur la feuille de match. Le voyage d’après, pour Edimbourg, sera encore plus difficile. Ecarté dès le début de la saison, et sans possibilité de trouver un prêt satisfaisant, le club des Hearts dans une situation financière difficile va se séparer du joueur sénégalais. Et son agent Moussa Nsambé, en froid avec Boubacar, va également lâcher l’affaire.
Fin tragique
A 20 ans et demi, Boubacar est au chômage. Après plusieurs semaines, il voudrait rentrer au Sénégal, mais il est dans l’incapacité pécuniaire de le faire. Après quelques semaines encore, il va rejoindre le club amateur du Edinburgh City FC, en 6e division britannique, pour se maintenir en forme.
Mais c’est son job d’employé communal à la capitale écossaise qui le fait vivre. Jusqu’au jour de son licenciement. Seul, séparé de sa famille, sans emploi et sans rêve, Boubacar (M)Amadou Diouf mettra fin à sa vie avec un email poignant envoyé à son frère Cheickh.
Quelques mois plus tard, c’est Pape Sene, petit-fils de Pape Diouf, et avocat de Cheickh Diouf, son arrière petit-neveu, qui prendra la parole au Tribunal international du Sport contre les pratiques d’engagement des mineurs dans le football africain et mondial.
Et heureusement, la désormais présidente d’honneur de la FIFA, Lara Dickenmann et ses 84 printemps, sera un grand témoin de cette audience, et influera pour faire évoluer les choses. Mais ça c’est une autre histoire…
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